• Témoignage de Claudia, stagiaire en Haïti •

Témoignage de Claudia, stagiaire en Haïti

15 décembre 2017

Quand le voyage nous mène bien plus loin que la destination…

Depuis quelques années, j’essaie de combiner ma passion pour le voyage et ma passion pour mon travail. Ce qui n’est pas évident, car être infirmière est plutôt routinier et nécessite de la stabilité, contrairement au voyage qui lui, permet d’être constamment en mouvement. J’ai donc trouvé une façon de voyager tout en pratiquant ma profession. J’en suis à présent à mon troisième voyage humanitaire : République Dominicaine en 2009, Équateur en 2014 et Haïti en 2017. Mes deux premiers voyages humanitaires étaient organisés et gérés par l’école. En mars dernier, j’ai eu envie de partir seule faire de l’humanitaire. Je cherchais un voyage dépaysant, où j’allais pouvoir aider concrètement les gens. J’avais envie de faire du bénévolat comme infirmière et de faire de nouvelles rencontres.

C’est à ce moment que j’ai fait la charmante découverte d’HorizonCosmopolite. C’est avec eux que j’ai trouvé l’équilibre parfait entre mon petit démon qui voulait partir seule à Haïti faire de l’humanitaire, et mon petit ange qui avait besoin d’un peu de soutien pour être certaine de revenir saine et sauve après ces 18 jours. C’était quand même mon premier voyage humanitaire seule!

Depuis mon retour, Geneviève, que je salue, me demande de lui écrire un petit texte au sujet de mon stage à publier avec mes photos. En plus d’être débordée et d’avoir manqué de temps, j’ai manqué de courage. J’étais incapable de mettre des mots sur mon expérience, sur ma situation, sur mes émotions. Je crois que je cherchais encore le réel impact qu’avait eu cette expérience sur ma vie… Je n’arrivais pas à placer 5 mots l’un à la suite de l’autre sans les effacer pour recommencer…

Il y a environ 1 mois, je discutais avec un patient de mon séjour à Haïti et il m’a demandé pourquoi j’aimais faire de l’humanitaire. C’est alors que mon inspiration a commencé. Il me demandait : « Qu’est-ce qui t’attires et te donnes envie d’aller à l’autre bout du monde, dans un milieu étranger où l’on parle une langue inconnue, de dormir dans la chaleur sur un lit très certainement inconfortable, de te faire dévorer par des moustiques énormes et d’aider des gens qui ne diront probablement même pas merci. » Une des premières choses qui me vient en tête lorsqu’on me pose cette question est que j’aime aider les gens dans le besoin et que je reviens de ces voyages grandis. J’ai l’impression que les gens que j’ai côtoyés m’apprennent beaucoup plus que ce que je leur apporte. Mais je n’ai pas su lui répondre sur le coup, je suis plus ou moins restée muette. Un peu étonnée par ses paroles et en même temps surprise par son envie et son intérêt de comprendre ma passion. Je lui ai donc dit que je reviendrais avec une réponse, que je devais d’abord trouver les mots. Alors me voilà le lendemain matin, avec la réponse que je croyais un peu plus complète. « C’est vrai que ce n’est pas facile de quitter le confort de sa maison, les terrains connus de son travail, l’amour de sa famille, le soutien de ses amis, pour aller s’installer quelques semaines dans un endroit où les gens vivent dans la misère. Une misère qui ne s’explique pas, elle se vit. Elle se vit lorsque chaque matin tu dois aller chercher de l’eau pour prendre ta douche, lorsque prendre de l’eau de ta bouteille pour te brosser les dents te rappelle que cela diminue ta quantité pour la journée. C’est aussi de revenir à la fin de la journée et d’apprendre que les petits de ta famille d’accueil n’ont pas mangé de la journée. De dormir dans un endroit sous un filet par peur de te faire piquer durant la nuit par un moustique, dans un lit plus confortable que n’importe qui dans la maison, car ils veulent que tu te sentes bien et que tu reviennes. D’être dans une maison sans fenêtre ou presque, sans air conditionné ni ventilateur, sous une chaleur suffocante, avec de l’électricité environ 6h par jour et sans accès au wifi. Finalement, c’est de se retrouver dans un milieu de travail inconnu, avec de nouveaux collègues qui ne parlent pas ta langue, avec des patients qui te dévisagent, car tu es : 1. blanche, 2. tu ne comprends rien à ce qu’ils te disent… et 3. avec des pratiques presque complètement nouvelles.

Mais par-dessus tout ça, c’est aussi de faire la rencontre d’une famille qui tente de t’accueillir du mieux qu’ils peuvent dans les conditions qu’ils peuvent.»

C’est vrai que ce n’est pas facile, mais c’est tellement dépaysant et tu apprends mieux à connaître tes limites et à les dépasser tout en essayant de garder le contrôle. C’est vrai qu’il y a beaucoup d’inconnues, mais la plus grande richesse de voyager est de s’ouvrir et de laisser l’autre te raconter son histoire, te montrer des lieux magiques et uniques que tu ne pensais même pas possible à Haïti… de laisser les gens qui t’entourent rendre ce voyage sensationnel par leur amour pour leur pays et l’envie de te montrer tous ces petits trésors dont ils sont si fiers. Parce que même dans cette misère, ils y trouvent du positif.

Après lui avoir fait comprendre que ce qui m’intéressait vraiment dans l’humanitaire, c’était le côté humain, nous sommes partis dans une discussion, qui s’est interrompue à plusieurs reprises et qui a durée plus de 2 jours. Nous avons abordé plusieurs sujets comme celui d’apprendre à connaître les gens qui sont autour de nous, d’en apprendre plus sur leur culture, leur religion et leur quotidien. D’apprendre à être détaché de notre environnement, des réseaux sociaux, de réapprendre que le contact avec l’humain c’est tellement plus que de regarder le Facebook de Jérémy, le twitter de Justin ou l’instagram de Clément.

Sans vous mentir, ma partie préférée de tout le voyage a été ma famille d’accueil ! Ils ont été accueillants, chaleureux, réconfortants dans les moments de faiblesse et prêt à tout dans les moments d’aventure. Mon patient m’a aussi dit : «Tu ne peux pas atteindre tout le monde avec tes petites actions. As-tu vraiment l’impression de changer quelques choses ? » Oui c’est vrai que je n’arrive pas à atteindre tout le monde, mais j’ai l’impression de faire une différence à une plus petite échelle. Il est aussi vrai que le problème vient de plus haut, mais moi j’ai choisi d’agir plus proche des gens, de façon plus personnelle. J’ai décidé de faire une différence que l’on voit, une différence qui touche les gens plus directement. Mon voyage m’a permis de faire de l’enseignement, de donner des soins, de participer à des émissions de radio, à des projets pour aider l’environnement et l’engagement des jeunes auprès de la communauté. Je pense que ce sont ces petites actions concrètes qui ont un impact direct sur la vie des habitants.

Honnêtement, ce que je trouve le plus dur est de m’adapter à mon retour au Québec plus que de m’adapter à mon arrivée en mission. Je voudrais remercier HorizonCosmopolite aussi pour leur soutien post-mission. Le retour est toujours le plus gros choc culturel pour moi. L’accès à l’eau potable qui coule à profusion et à l’électricité n’importe où, n’importe quand, les gens mécontents alors qu’ils sont dans l’abondance, dans la surconsommation, la facilité… Je me sens vraiment incomprise… impuissante…

Vous savez ce que mon patient m’a dit à la fin de cette conversation : « Il est important pour toi de revenir ici, même si le retour est si difficile. Il est important de ne pas oublier d’où tu viens, de quoi tu es faite, car rappelle-toi ce que tu m’as dit : “ils m’en ont beaucoup plus appris que je leur en ai appris…” Alors, imagine-toi tout ce que tu as pu leur apprendre ! » Je crois qu’on a nous aussi beaucoup à apprendre ici.

Oui, le retour est la phase la plus difficile de tout ce merveilleux projet. Tu passes par toutes les étapes du deuil en te disant que tu n’y retourneras jamais, car tu t’ennuies quand tu es là-bas et en même temps, c’est trop difficile de revenir à chaque fois. Et enfin tu te rends à l’étape de l’acceptation et tu finis par t’avouer que c’est la plus belle chose que tu as faite dans ta vie. Tu te nourris de tout cet amour, de toutes ces belles rencontres et de tous ces nouveaux défis que chaque périple te propose… et tu finis par te dire que tu repartiras certainement bientôt ! #dansquelquesmois

Au plaisir de vous avoir inspiré et de vous avoir donné l’envie de jumeler votre passion à l’humanitaire.

Claudia

Pour plus d’information sur nos projets en Haïti, vous pouvez consulter: https://horizoncosmopolite.com/projets/stages-internationaux/haiti/

Pour démystifier les termes « aide humanitaire » et « tourisme solidaire »: https://horizoncosmopolite.com/20-ans-de-stages-internationaux/tourisme-solidaire-vs-voyage-humanitaire/

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